Panorama des futures extensions régionales, culturelles ou linguistiques

Le feu vert au lancement tant attendu des nouvelles extensions qui viendront bouleverser le nommage actuel sur la toile est attendu lors du prochain congrès de l'ICANN à Singapour au mois de juin 2011.Parmi les nombreux projets de création de nouvelles extensions, de nombreuses ont vocation à mettre en avant une culture, une région ou une communauté. Panorama des futurs .BZH, .EUS, .FLORIDA, IRISH ou .QUEBEC

 

ICANN et diversité

Par le passé, l'ICANN a démontré qu'elle encourageait, ou en tout cas comprenait, les initiatives amenant à un Internet dont la diversité deviendrait une richesse : -    Adoption des IDN ccTLD (fast track system) -    Introduction du .CAT catalan en 2006 -    Structure internationale dont les participants viennent du monde entier Les projets de TLD à dominante culturelle et linguistique vont clairement dans ce sens : faire connaître une communauté, promouvoir une langue ou une région à dynamisme et identité fortes comme ce fut le cas pour le .CAT.

.CAT : « Mès que un domini »

Le .CAT sert désormais d’étendard pour nombre de porteurs de projets. Ce suffixe, à la fois géographique et culturel et comptant depuis peu plus de 50 000 enregistrements, aura fait des émules depuis son introduction en 2006. Le .CAT a dorénavant tout d'un grand et nombreux sont les projets annoncés qui aimeraient connaître une réussite similaire.

Pour rappel, les .CAT sont ouverts à tous à condition de remplir les conditions d’éligibilité suivantes:

  • Développer des activités, dans n’importe quelle langue, qui promeuvent la langue et la culture catalanes ;
  • Mettre en ligne, dans les six mois qui suivent l’enregistrement du nom de domaine en .cat, un site web ayant au moins une partie en langue catalane.

Les projets européens autour de l’ECLID

Certains projets européens sont en chantier depuis plusieurs années et sont réunis avec le .CAT, au sein d’une association nommée ECLID (European Cultural and Linguistic Internet Domains). Elle tente de les promouvoir et de les faire reconnaître auprès de l’ICANN comme étant le chaînon manquant, synonyme d’un besoin de diversité sur un Internet devenu trop global et dont les génériques historiques comme le .com ou le .net sont saturés. Les projets suivants sont réunis au sein de l’ECLID :

Le .eus veut contribuer au développement de l'euskera et de la culture basque sur l'Internet. Le pays Basque s’étend, entre France et Espagne sur 20 500 km2 où habitent environ 3 millions de personnes.

 

Le .BZH breton a pour objectif de faire la promotion de la Bretagne, sa langue et sa culture. Rappelons que la Bretagne compte quatre départements et quelques villes fortes comme Rennes ou Nantes.

 

Le .cym se veut être le défenseur de la langue et de la culture galloise à travers le monde. Le gallois est la deuxième langue parlée au Pays de Galles et le suffixe .cym vient de Cymru qui signifie tout simplement Pays de Galles en gallois.

 

Le .gal vise à promouvoir langue, culture et histoire de la Galice. La fondation PuntoGal annonce quatre millions de personnes parlant la langue galicienne.

 

 

Le .scot se voit quant à lui être le futur emblème de la langue et de la culture écossaise. Comme leurs voisins gallois, les écossais privilégient pour l’heure le .co.uk britannique mais aimeraient s’en démarquer par un TLD qui leur serait spécifique.

 

D'autres projets annoncés

A l’instar des extensions citées plus haut, des projets se multiplient un peu partout dans le monde et pour en faciliter leur lecture, nous pouvons les regrouper d’une part en extensions régionales (voire étatique lorsqu’il s’agit d’un état américain comme la Floride) et d’autre part en noms de domaine communautaires. Vous entendrez donc peut-être bientôt parler des noms de domaine suivants :

-    Régions : .AND (Andalousie), .BAYERN (Bavière), .FLORIDA, .QUEBEC, .SAARLAND (Sarre), .VAL (Communauté valencienne), .VL (Langue flamande)… -    Communautés : .ARAB (ligue des états arabes), .IRISH (Communauté irlandaise), .KAB (Communauté kabyle), .KER (Cornish language), .KURD (Communauté kurde), .VEN (Communauté vénitienne), .ZULU (Communauté zulu), etc

La part belle est faite aux projets ibères. L’Andalousie, la communauté autour de Valence, le pays Basque et la Galice espèrent ainsi venir talonner la Catalogne ! Cela nous montre aussi qu’un pays n’est pas uniforme car composé de multiples cultures et langues qui font que ces projets ont sans nul doute beaucoup de sens. La France n’est pas en reste et le projet breton ne restera pas longtemps isolé. Un sondage a par exemple été lancé pour un .AQUITAINE, l’objectif étant d’avoir un avis des internautes pour le lancement d’un TLD lié à cette région.

La cartographie française et la présence de nombreuses régions à identité forte devraient voir à coups sûrs l’éclosion d’une myriade de projets dans les mois à venir. Un appel d’offres a par exemple été lancé pour un dot corsica. De là à imaginer un .OCC pour l’Occitanie ou encore un .prouvènço voire un .paca, il n’y a qu’un pas.

Et tout cela sans compter les futurs cityTLD comme le .PARIS ou le .TOULOUSE qui devraient faire grand bruit dans les semaines à venir.

Conditions de réussite

Si de tels projets devront être viables économiquement, condition évidemment sine qua none pour rentabiliser un tel investissement et parce que nous restons, avec l’ICANN, dans une logique de rentabilité, il ne faudra surtout pas qu’ils ne limitent à un carcan trop communautariste.

Une forte identité communautaire comme celle des basques ou des bretons pourrait certes être un facteur déterminant quant à la réussite de ces nouvelles introductions mais cela ne peut en être le seul argument pertinent. Ces extensions doivent également être un moyen de réunir des communautés sur Internet et cela, autour d'une dimension culturelle qui pourrait être un des points phares de leur succès. L’alliance crée par l’ECLID est à ce niveau une excellente initiative.

Ces extensions devront également concourir à démontrer du dynamisme économique d’une région ou encore à promouvoir un patrimoine et une histoire forte. Il y a fort à parier que besoin de reconnaissance et volonté d’ouverture sur le monde seront autant d’arguments propices à convaincre de nombreux acteurs de s’allier autour de tels projets.

La communication autour de ces nouveautés devra donc être très soutenue et commencer avec tous les partenaires locaux (institutions, collectivités, entreprises…) qui constitueront une rampe de lancement à même d’apporter la reconnaissance nécessaire au décollage de ces extensions et afin d’en favoriser la propagation.

Des interrogations subsistent

La feuille de route est donc déjà bien remplie mais d’autres interrogations viennent complexifier encore un peu le tout. Car si l’intérêt de ces TLD est certain, de nombreuses questions restent cependant en suspens, notamment sur l’accessibilité de certains noms de domaine et sur la nature même des futurs contenus proposés: un site en .BZH devra-t-il être obligatoirement en breton ? Sera-t-il uniquement accessible aux bretons ? Par ailleurs, le coût d’un tel projet pourra-t-il être assumé par tous ces porteurs de projets : frais de dossier et redevance annuelle pour l’ICANN, coût marketing… L’ardoise pourrait être particulièrement élevée pour voir son TLD naître. Une somme d’éléments est donc à prendre en compte afin de voir ces projets acceptés puis rentabilisés. La route sera décidément bien longue mais, avec pour modèle un .CAT détonant, la voie reste ouverte à tous les espoirs.